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 Gabrielle d'Orr

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Yobwo

Yobwo


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MessageSujet: Gabrielle d'Orr   Gabrielle d'Orr EmptyMar 28 Juil - 19:17

Ma participation à un concours RP sur le thème d'Orr.


GABRIELLE D'ORR :



Nathan était parti. Rien ici ne le retenait plus désormais. Alors il avait rassemblé ses affaires et s'en était allé, sans un regret, maudissant jusqu'à ceux qu'il avait aimé. Orr la neutre avait perdu une partie de ses enfants, happés par l'appel des armes, comme dévorés par un démon affamé.

Debout sur le rivage, Gabrielle faisait face à une mer grise aux flots bouillonnants. Le ciel, bleu-gris, était un mélange d'obscurité et de lumière que perçaient quelques rayons d'or pâles. Un tableau d'intense mélancolie soumis au vent du large. Sa chevelure cuivre soulevées par les bourrasques, la femme serrait contre elle un châle aussi fin qu'inutile. Des rides commençaient à creuser son visage. Elle avait quarante ans. Elle n'en demeurait pas moins belle, gracieuse et affirmée, tandis que se délitait tout ce qu'elle avait connu. Si elle était ainsi tournée vers l'horizon, ce n'était pas d'espoir. Il n'y en avait pas pour Orr. Le grand et merveilleux royaume vivait ses derniers jours. Peut-être ses dernières heures. D'une manière ou d'une autre, elle l'avait pressenti lors du départ de Nathan. Les Guildes s'étaient affrontées et, aujourd'hui, la guerre s'achevait sans vainqueur. A des lieues, dans son dos, là où elle n'osait regarder, Arah voyait arriver l'immense vague du fléau.

C'était incompréhensible. Les Charrs avaient jailli de nulle part, s'étaient abattus en masse sur Ascalon. Le voisin du Nord était tombé le temps d'une respiration. Le puissant et prospère royaume d'Ascalon avait été balayé, si désespérément fragile. La capitale était un cimetière. Les terres verdoyantes s'étaient muées en landes noires immondes sous l'impulsion des félins sorciers qui, enragés, avaient invoqué et déchaîné les flammes de l'enfer jusqu'à ce que toute vie s'éteigne. Pourquoi avaient-ils fait cela ?

Quelle... absurdité.

Plus absurde que le soudain besoin des guildes à s'entre-déchirer ? Penses-tu sincèrement, Gabrielle, que les humains soient blanc comme la neige éternelle des Cimefroides ? N'avaient-ils pas esquissé eux-mêmes les prémices de la destruction ?

Elle réprima un sanglot, la gorge douloureuse puis se perdit dans le va-et-vient des vagues, les joues sillonnées de larmes. L'Histoire était ainsi faite. Pour une mystérieuse raison, l'humanité ne parvenait pas à conserver le calme et la paix. Le destin d'Orr le prouvait. Orr avait toujours été une terre pacifique, riche de culture. Un modèle de civilisation béni des Dieux, autrefois sanctuaire de plusieurs d'entre eux. Pourtant, les clameurs sanglantes, le tintement métallique des armes s'étaient immiscés au coeur des champs, des maisons, des temples, des bibliothèques, des palais, des villages de pêcheurs, des couches, cris odieux déchirant les amitiés, les familles, les couples. Un homme avait pris une épée et en avait tué un autre. Dans la rue, suite à une vive altercation. Il avait hurlé que le mal était présent et devait être éradiqué. Qu'il prenait la forme de n'importe lequel d'entre nous. Qu'il fallait agir avant qu'il ne soit trop tard.

Mais quel mal ? Au début de la guerre des Guildes, Orr s'était tenu à l'écart. Le Conseil avait refusé de se mêler d'un conflit qui ne le concernait pas. Un voeu pieu aussitôt brisé par l'acte impulsif d'un fou anonyme, fier d'appeler au meurtre. La mère de Gabrielle avait assisté à la scène. Tous les témoins avaient gardé une image très précise de l'évènement. Elle avait raconté les moindres détails à sa fille, encore terrifiée par l'horreur de ce que l'on se refuse à croire. Un matin banal, semblable à des milliers, elle était sortie les bras chargés de fruits, réunis dans une grande panière. Le marchand de la place centrale d'Arah vendait les plus belles pommes qu'elle eût goûté. Sa mère allait chaque semaine en acheter deux kilos. Alors qu'elle réglait la somme, une rixe avait éclaté au-dehors. Elle ne souhaitait pas s'attarder. Le marchand lui avait emboîté le pas, curieux et craintif des dégâts sur sa devanture si cela venait à dégénérer. Etrangement, sa mère n'avait aucun souvenir du coup d'épée ou de son bruit. Il n'y avait que le corps sans vie de la victime anonyme et sa chute interminable vers le sol. Les pommes l'avaient imité, roulant sur les pavés. L'expression de l'assassin avait été celle d'un fanatique. Un aveugle persuadé d'avoir obéi à la justice. Au mépris du bon sens le plus élémentaire.

« Ce genre de chose n'arrive que si l'Histoire s'est mise en marche. Il est insupportable de voir à quel point les éléments déclencheurs des plus grandes catastrophes sont insignifiants »

C'est ce que lui avait dit Emeline, sa mère. Elle s'était éteinte sur ces mots, il y avait un an. Si Gabrielle n'avait pas su comprendre dans un premier temps le sens de ces paroles, le départ de Nathan lui avait violemment ouvert les yeux.

Petit à petit, d'insidieuse façon, les mentalités avaient été empoisonnées. Aux rumeurs initiales de conflit, l'opinion publique s'était montrée ferme. Le Conseil avait condamné les guildes responsables et interdit aux factions d'Orr de s'engager dans la guerre. Cela avait fonctionné. Puis, les combats s'éternisant en Kryte ou à Ascalon, le peuple et les diplomates avaient cessé de s'insurger. Dès lors, les voix belliqueuses ne furent pas longues à s'exprimer. Elles rencontrèrent de moins en moins de résistance pour, finalement, éclabousser de sang les pavés de la capitale. Ce fut une sirène. Nathan y avait cédé. Lui et des milliers d'autres qui, comme les pommes d'Emeline, tombaient devant la furie insensée de l'épée. Gabrielle avait le sentiment que jamais ces âmes ne trouveraient le repos.

Bien sûr, tous ces fous avaient choisi de s'entêter, de s'aveugler. Quand le nombre de morts était devenu problématique, personne n'avait osé faire marche arrière. Ne vaut-il pas mieux s'obstiner qu'avouer ses fautes ? Un royaume est constitué d'êtres humains et n'est donc régi que par leurs faiblesses. L'arrivée des Charrs avait été perçue comme un coup de pouce du destin. Les créatures mettaient Ascalon à genoux. De la sorte, Orr n'avait plus qu'à se concentrer sur la Kryte. Pourtant, la chute brutale des ascalonniens força la trêve. Les troupes se retirèrent, choquées devant l'impensable. Qui aurait imaginé voir les soldats du Roi Adelbern écrasés aussi implacablement ? Mais au lieu de prendre garde, les généraux avaient loué ce répit car il permettaient aux armées de se réorganiser. Quand les Charrs ne se contentèrent pas d'une charogne, la peur gagna les bastions inébranlables. Encore une fois, les chefs se rassurèrent en arguant la logique. La conquête d'Ascalon ne pouvait qu'avoir affaibli les Charrs dont les soldats orriens se débarrasseraient aisément. Un raisonnement imparable. Malheureusement, ce n'était pas la logique qui avait vitrifié un pays entier... le fléau était intact. Les remparts s'étaient brisés. Arah était sans doute en train de s'effondrer. Gabrielle s'attendait à percevoir les rugissements bestiaux des Charrs, derrière les dunes. D'une certaine manière, elle les entendait déjà.

Elle s'accroupit, les pieds à portée de l'écume. Le contact de l'eau était froid. Nathan était mort depuis longtemps. Elle n'avait pas eu d'enfant. Elle leur avait épargnés cette fin misérable. Les larmes se perdirent dans la mer, le sel se mélangeant au sel. La femme se pencha et prit une poignée de sable qu'elle laissa chuter en un tas informe vite effacé par les vagues, jusqu'à ce que la plage redevienne parfaitement lisse. Ainsi en allait-il des vies. Orr était un tas de sable. Les vagues du temps s'apprêtaient à l'effacer. Quelle monstrueux sourire du destin...

Gabrielle ne voulait plus se redresser. Elle ne voulait plus affronter l'inéluctable. L'attente était pesante. La certitude réduisait son corps, son coeur et son esprit en miettes. Elle en souhaitait presque mourir dès à présent. La figure décomposée, Gabrielle hurla. Une partie de son âme se détraquait. Elle commença à maudire tout ce qui pouvait l'être : les Charrs d'exister, Nathan de l'avoir abandonnée, Orr de s'être obstinée, le destin (ou quoi que ce fût) de tendre vers la destruction. Ses cris se disputèrent aux bourrasques. Le large l'ignorait. La mer n'écoutait pas. Et Gabrielle était seule. D'instinct, les oiseaux s'étaient enfuis. Elle demeurait sur une côte du royaume soudainement devenue nulle part. Elle hurla, hurla, hurla... tant et si fort que sa gorge la fit souffrir. Alors elle s'arrêta et rouvrit les yeux.

Le silence était absolu. La mer s'était tue. L'eau recouvrait ses pieds sans un bruit. Le vent continuait d'ébouriffer ses cheveux, muet. Ni souffle, ni clapotis, ni crissement du sable. Comme si d'une seconde à une autre, le monde était mort. Qu'il n'était plus qu'une coquille vide, un trompe-l'oeil, un morceau de papier-peint se décollant d'un mur en ruine. Il suffisait qu'elle tende le bras et qu'elle gratte du bout des ongles pour qu'il s'affaisse sur lui-même.

Une intense lumière la fit se retourner. Gabrielle s'avança puis escalada le rempart de dunes. L'horizon étincelait de mille feux. Le soleil était venu recontrer la terre. L'éclat blessait les yeux. Elle ne s'en détourna cependant pas. Ce qu'elle contempla à cet instant dépassait les jolis plaisirs de l'existence. La cîme des arbres noyée par l'éblouissant rayonnement tutoyait les créations divines. La peur avait été remplacée par l'émerveillement. C'était un spectacle magnifique.

Qui y avait-il là-bas ? N'était-ce pas la direction d'Arah ? Oui, probablement. La capitale s'étendait sous la merveilleuse nitescence. Gabrielle se prit à espérer. Les Dieux étaient descendus secourir les hommes afin de les protéger des démons. Orr avait été l'antique cité de Melandru, Dwayna et Balthazar. Ils venaient sauver leur fief. La raison du dôme de lumière ne pouvait être que celle-ci. Gabrielle y croyait dur comme fer. Son espoir était à la mesure de son ancien désespoir. Elle avait un besoin absolu de chasser la terreur, telle une gamine terrifiée par le noir et se raccrochant à la moindre lueur en pensant éloigner les cauchemars. Les yeux écarquillés, mains jointes en prière, agitée de rires nerveux, Gabrielle assista à la lente maturation du dôme. Une voix, celle de sa mère, tinta dans son crâne :

« N'as-tu pas grandi, Gabi ? »

Elle sursauta. Elle ne savait plus où regarder. La voix avait brisé son assurance. L'éclat rougeoyait et continuait à enfler. Le silence fut remplacé par un bourdonnement désagréable qui amplifia progressivement. Gabi plaqua les mains sur ses oreilles mais le son lancinant la transperçait sans effort. Les secondes se changèrent en éternité. Le vrombissement était une torture. Elle défaillit. Prise de faiblesse, ses appuis se dérobèrent. Elle s'écroula au sommet de la dune. Ses jambes et ses bras ne répondirent plus. L'univers entier tournait autour du vrombissement et, au loin, le dôme était rouge feu. D'un oeil vitreux, elle le vit se résorber. Le phénomène semblait vivant et il prenait une fabuleuse inspiration. Le ciel, les nuages la forêt, le sable, le corps de la femme allongée s'étiraient vers lui. L'impression dura une minute, une heure, un an. Enfin, l'énergie contenue dans le dôme se libéra.

En un battement de paupière, l'explosion annihila la péninsule. Les armées charrs se dispersèrent en une nuée de cendres. La langue de terre se fissura et se fragmenta en une myriade de gigantesques blocs de roche aussi gros que des montagnes. Toute vie fut vaporisée. Brisé, le royaume fut happé par la mer. Sous l'impact d'un cataclysme, Orr cessa d'exister.

Avant que la déflagration ne l'emporte, la femme entendit un murmure aux accents tristes. Nathan, d'une manière ou d'une autre, lui confiait son expérience et son tourment puisqu'elle le rejoignait :

« Tu viens à moi mais il est trop tard. Il n'y a plus rien à attendre désormais. Ce que nous connaissions s'en est allé. Alors dors, Gabrielle d'Orr. Dors si les dieux te le permettent. Dors si ton coeur bat encore. Je t'en conjure. Car s'il est mort, tu seras condamnée à errer. Pour l'éternité. Et n'essaye pas de me retrouver »
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MessageSujet: Re: Gabrielle d'Orr   Gabrielle d'Orr EmptyMer 29 Juil - 12:29

Très joli! La sensibilité du texte est extrêmement bien rendue, agréable à lire, et comme toujours dans un langage et d'une fluidité impeccables. Du grand art, bravo !
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MessageSujet: Re: Gabrielle d'Orr   Gabrielle d'Orr EmptyDim 16 Aoû - 11:50

Ce matin, je me suis dit qu'il était temps que je rattrape mon retard et que je lise tous les récits que je n'ai pas encore commenté...

La première question qui m'est venu à l'esprit, c'est : as-tu gagné ce concours ? Very Happy

Bon, sinon, je trouve que prendre le point de vue d'une pauvre femme ayant tout perdu pour décrire la disparition d'Orr est une idée originale. Au passage, tu as quand même réussi à imbriquer la description des événements récents, toujours du point de vue de la même personne... C'est bien fait.

Après, j'aimerais bien en savoir plus sur ce qu'avait manigancé le Vizir Kilbron pour réduire ainsi en cendres son royaume... Et surtout, même si il dort, je me demande si la présence du Grand Dragon n'y est pas pour quelque chose, surtout que celui-ci contrôle les morts-vivant, d'après ce qu'on sait de GW2 Neutral

Enfin bref, sinon l'émotion est bien retranscrite, et on parvient très bien à s'imaginer ce grand dôme lumineux au dessus d'Arah... Je suis triste à l'idée que Gabrielle d'Orr puisse être devenue un mort-vivant...
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MessageSujet: Re: Gabrielle d'Orr   Gabrielle d'Orr EmptyLun 17 Aoû - 19:21

Non, je n'avais pas fait un excellent résultat, la faute à un texte pas forcément très accessible et un peu trop abstrait.

Je voulais décrire la catastrophe à travers ses prémices via les yeux et la mémoire d'une Orrienne, toujours avec une certaine distance. Faire vivre la chose de l'intérieur sans y être de plain-pied. Le tout accompagné d'un fort sentiment de tristesse mâtiné d'onirisme et de poésie.
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