Flora, Ad Vitam.

L'histoire de Flora commençait, à l'âge de 13 ans. Sa famille, de classe moyenne, vivait de l'artisanat, elle était installée dans les quartiers au sud de la Place du Marché, non loin du port. Elle était tout ce qu'il y a de plus normal.. Bercée par l'amour de ses parents, Flora passait le plus clair de son temps libre à jouer avec ses deux petites sœurs sur les quais du port.

Cependant, elle aimait beaucoup étudier, et aussi écouter les récits des aventuriers de passage, également ceux des marchands, qui lui décrivait les continents voisins et leurs régions, comme la Kryte et les dangereuses Cimefroides, mais encore Vabbi et ses somptueuses citées, parfois même, certains avaient même des dessins ou peintures, pouvant nourrir son imagination.

Plus petite que les autres enfants de son âge, elle était très aimée dans le quartier, par sa gentillesse et sa joie de vivre, elle était également très appréciée des jeunes garçons, mais son amour pour les livres la rendait aveugle de tout ces beaux sentiments.

Un soir, la nuit tombée, alors que le vent salé soufflait par la fenêtre de la chambre des trois jeunes filles, plongées dans leurs rêveries. Des craquements se firent entendre, des ombres et la disparition de sa sœur cadette. La stupéfaction régnait sur le quartier, au petit matin, on pouvait compter quatre enlèvements, Hikowa, la sœur de Flora, un autre jeune fille nommée Maria et deux garçons légèrement plus âgés, Sagara et Kinaki, les familles, aussi stupéfaites, désespérées, que plongées dans un chagrin démesuré, ne comprenaient visiblement pas ce qu'il se passait.

Les autorités canthiennes arrivèrent un peu plus tard dans la matinée, ils se contentèrent de poser quelques questions aux habitants voisins et aux familles des victimes, déclarant avec regret de pas pouvoir faire grand chose dans ce type de situation et ne cachant pas non plus que leur principal suspect était la guilde Am Fah, très puissante dans cette partie du centre-ville canthien. Cependant, Le père de Flora, Nathanaël, réagissait d'une façon, d'après elle, pour le moins anormale, comme si il savait que cela risquerait d'arriver tôt où tard.

Flora, tout aussi intriguée par les réactions de son père et encore sous le choc de la disparition de sa petite sœur qu'elle chérissait tant, ne comprenait plus ce qu'il se passait.. Le soir même, à la fin du dîner, on frappa à la porte. Son père alla ouvrir et revint en demandant à ses filles d'aller dans leur chambre.

Flora entendit son père déclarer « Bonsoir Jin... merci d'être venu, entre, je te prie.. », avant que sa mère la pousse gentillement pour qu'elle avance. Flora l'avait deviné, une réunion avait lieu chez elle par le bruit du plancher, on pouvait facilement deviner qu'il n'y avait pas qu'un seul invité. Sa mère, l'ayant cloîtrée dans sa chambre avec sa petite sœur Haiko, l'empêchait donc d'y assister.. Après un moment d'inattention de sa mère et poussée malgré elle du besoin de savoir, de comprendre ce qui se passait, elle décida de se glisser hors de sa chambre.

Arrivée devant la porte de la salle à manger, où se tenait cette réunion, son coeur se mit à battre la chamade. Après quelques instants d'hésitation, elle finit donc par se décider et de regarder par la serrure. entendit, tout en sortant de la salle à manger,

Les personnes présentes était son père et trois autres hommes, ils se tenaient autour de la table, écoutant tous le père de Flora. Elle découvrait un par un les visages des personnes présentes, elle comprit aussitôt. Les hommes présents ici étaient les parents des enfants enlevés la nuit précédente.

Elle avait cependant pu réussir à entendre quelques paroles de son père, disant : « Il faut agir.. dans les jours qui viennent.. nous ne pouvons pas le laisser faire.. Seuls les dieux savent ce qu'il peut faire à nos enfants..» Malgré la stupeur et l'incompréhension s'étant emparée d'elle, elle eut la présence d'esprit de rentrer dans sa chambre..

Cette nuit là, son sommeil fût long à trouver, l'esprit occupé par de nombreuses questions, sur sa soeur, cette réunion et les événements futurs, ne pouvait s'empêcher de pleurer, elle se rendait compte que sa petite vie tranquille prenait un sombre tournant.

Les jours suivants, son père, comme les autres hommes étant présent la veille chez elles, se montraient plus occupés qu'à la normale, ils s'affairaient sans cesse, quelque chose se tramait dans l'ombre.. Puis, comme Flora s'en doutait, trois jours plus tard, au milieu de la nuit, Nathanaël, vint voir Flora qui faisait croire à un sommeil profond, l'embrassa sur le front, de chaudes larmes coulaient sur ses joues, Flora se rendait compte que le moment était venu, mais ne trouvait pas la force d'implorer son père de rester. Le lendemain, le bruit circulait déjà que les quatre hommes en question étaient partis, au beau milieu de la nuit. Les rumeurs racontaient que ces hommes pouvaient être déjà considérés comme morts..

Les mois suivants ont sûrement été les plus rudes de Flora, la solitude, la tristesse et la seule présence familiale était sa pauvre mère, assurément plus affaiblie que Flora et le départ de sa petite sœur Haiko au monastère Shing Jea. Un matin, une rumeur circulait comme quoi un des hommes partis chercher les enfants était de retour en ville.

Prise d'un espoir soudain, Flora accouru pour accueillir le revenant, elle alla au port, scrutant tous les bateaux, avançait petit à petit sur le quai, puis, à mesure de son avancée, elle remarqua un large groupe de personne affairé autour de quelque chose d'apparemment surprenant et inhabituel, au vu des discutions qu'il s'en échappait.

Flora sentit son cœur faire un bon, son envie de se mettre à courir pour aller voir de ses propres yeux la personne en question était démesurée, mais sa timidité habituelle avait tout de même le dessus. Avançant pas à pas, elle pouvait distinguer une silhouette couverte de bandages, prenant son courage à deux mains, elle se glissa entre les gens affairés autour de l'homme blessé.

Tremblante, elle arriva nez à nez avec Jin.. Les yeux écarquillés, il ne savait pas quoi lui dire.

Flora était dans les bras de sa mère, rentrée chez elle depuis peu, elle pleurait son père. Son espoir s'était envolé, sa seule raison de vivre était désormais d'être là pour sa petite sœur et sa mère, qui était d'autant plus dépressive qu'avant.

Quelques jours plus tard, au petit matin, on frappa avec vigueur à la porte de leur maison. Flora, habillée de sa robe de chambre alla timidement ouvrir. Jin, se tenait là, il ne lui restait plus autant de bandages, seuls quelques-uns étaient toujours présents, pour apparemment recouvrir une profonde plaie au torse. Il détenait quelques livres, d'apparence ancienne, après quelques secondes de silence, il s'écria :

« Nous avons du travail.. Si tu veux un jour retrouver ta sœur.. Viens me voir si cela t'intéresse..»

Il déposa les livres dans les bras de Flora, qui les pris sans rien dire, après quelques secondes de réflexion, elle ouvra la bouche pour répondre, mais Jin était déjà parti. Elle abandonna son petit-déjeuner et alla s'adonner au feuilletage des livres qu'elle venait de recevoir dans sa chambre.

Allongée sur son lit, elle ne mit pas longtemps pour remarquer que tous les livres parlait de prières, de maitrise des enchantements et d'autres activités propres aux moines mais d'un niveau infiniment plus avancé que tout ce qu'elle avait pu étudier auparavant. Sans savoir réellement pourquoi, un soupçon d'espoir revenait en elle.

Pendant toute la matinée, elle passa son temps à lire l'un des livres, consacré à l'usage des enchantements à usage de protection. L'après-midi venant, après s'être restaurée auprès de sa mère, d'un pas décidé, elle se dirigea vers la maison de Jin. Elle frappa à la porte avec conviction et l'attente ne fut pas longue, Jin entrouvris la porte peu après. Voyant Flora, il se contenta de lui ouvrir la porte plus amplement.

Arrivés dans la pièce lui faisant office de bibliothèque, Flora était émerveillée, les livres étaient indénombrables et un petit bureau était installé au fond de la pièce, éclairé par les fenêtres le côtoyant. Une pile de livres y était entreposée, Jin les lui présenta, puis s'éclipsa de temps à autres, et apporta périodiquement à Flora une petite collation pour reprendre des forces.

Après plusieurs semaines d'études intensives, Jin l'emmena dans un petit temple hors de la ville, l'endroit était somptueux, d'imposants piliers étaient disposés tout autour de la bâtisse quant à la vue, elle donnait sur la mer, se cassant contre la falaise quelques dizaines de mètres plus bas. Après quelques minutes de rêvasseries de la part de la jeune fille, Jin déclara : « C'est ici que nous allons désormais recueillir les fruits de tes études. Voici tes armes.. prend en bien soin.. c'est ça qui te gardera en vie.. ainsi que tes coéquipiers.»

Jin lui donna une fine baguette de platine et un icône argentée. Flora examina ses premières armes minutieusement, les pris en main sans délais puis s'écria :

« Je suis prête.. Allons-y ! »

Les semaines, puis les mois passèrent, Flora s'entraînait tous les jours, jusqu'à tomber de fatigue. Ses prières et ses enchantements devenaient de plus en plus efficaces. Un soir d'hiver, avant de rentrer, Jin lui demanda de venir prendre quelques livres à étudier pour la suite de son entrainement. Tenant les livres contre sa poitrine, elle sortit de chez Jin, ayant à peine ouvert la porte, elle tomba en face d'un jeune homme.

Il était grand, vêtu d'une sombre et fine armure, le bas de son visage était caché par un masque noir, des dagues étaient fixées de part et d'autre de son armure et un katana était placé dans son dos. Prise de panique, Flora couru chez elle, manquant de peu de perdre des livres dans sa course.

Le jeune assassin resta perplexe jusqu'à l'arrivée de Jin à l'embrasure de la porte qui lui déclara avec un sourire :

« Voici ta nouvelle coéquipière, elle est très douée, enfin, nous verrons ça demain. Entre mon fils, tu dois être fatigué avec toute cette route. »

Le lendemain, Flora se présenta avec appréhension chez Jin, lorsque la porte s'entrouvrît, elle eut un léger sursaut, c'était le même inconnu qui se trouvait face à elle. Ce matin-là, il était habillé d'une chemise et d'un pantalon noir. Son masque et ses armes retirées, Flora voyait désormais un beau jeune homme au lieu du sinistre assassin auquel elle avait eu affaire la veille au soir. Face au silence de Flora, il engagea la discussion :

« Bonjour mademoiselle, je m'appelle Raito, enchanté de faire vôtre connaissance.. » dit-il avant de se pencher légèrement, prenant la main droite de Flora pour l'embrasser.

Flora, se laissant faire, répondit timidement en gardant ses livres contre elle. L'instant suivant, Jin arriva, demanda silencieusement à Raito d'aller se préparer, dès lors, le jeune homme s'exécuta, Jin vint ensuite devant Flora et lui dit d'une voix paisible :

« Raito va désormais t'accompagner à l'avenir, je n'ai plus rien à t'apprendre, seuls les voyages et l'expérience que tu vas en acquérir pourront t'enrichir désormais. Suis moi, maintenant. »

Jin pris le chemin de la bibliothèque, sur la table, éclairée par le soleil levant, reposaient plusieurs baguettes, boucliers et divers calices. Flora restait sans voix face à tant de beauté, les armes scintillaient, brillaient, certaines, même, étaient comme lumineuses. Jin, voyant l'état de Flora continua :
« Ces armes sont désormais à toi, mais, ce n'est pas tout. Jin l'entraîna une chambre à coucher. Sur le lit, reposait une armure légère, elle était de couleur bleue et soigneusement finie. Puis Jin repris :

« Je l'ai fait faire par l'armurier de la maison Zu Heltzer, j'espère qu'elle te plaira.. Je vais te laisser pour que tu l'enf..»

Avant qu'il n'ai pu finir sa phrase, Flora le serrait déjà dans ses bras. Jin, souriant, se mit également à la serrer contre elle, puis, ce moment de tendresse passé, il s'éclipsa de la pièce, laissant Flora se changer.

Après quelques minutes, Flora rejoignit Jin et Raito, discutant dans l'entrée. Ses armes en main et sa nouvelle armure lui donnait une image totalement changée. Lorsque les deux hommes se retournèrent, légèrement abasourdis, ils admirèrent Flora, après un court instant, Jin déclara avec un sourire :

« Hé bien.. te voilà bien changée ma petite.. »

Voilà bientôt trois ans que Flora et Raito travaillaient ensemble, leurs liens se renforçaient de jour en jour, ainsi que leur complicité. Ils avaient parcouru la majeure partie du pays, apprenant de nouvelles techniques, aidant les personnes dans le besoin et accomplissant quelques petits services nécessitant leurs compétences.

Flora n'avait pas beaucoup grandi, mais paraissait nettement plus adulte. Raito quant à lui, figurait toujours plus mystérieux sous sa sombre armure, cela lui donnait également beaucoup de charme, ce qui ne laissait pas Flora insensible.

Après plusieurs mois d'absence, Flora et Raito décidèrent de retourner voir leurs familles respectives, à leur arrivée, la maison de Jin était fermée, après y être entrés, ils se rendirent compte que la maison avait été abandonnée plusieurs mois auparavant. Quelques instants plus tard, ils se mirent à explorer la maison,

Flora, arrivant à l'entrée de la bibliothèque s'arrêta net, elle appela Raito, qui arriva dans les secondes suivantes. L'endroit n'avait pas changé, sur le bureau où Flora avait passé tant de temps à étudier, une enveloppe y était déposée. Après un bref regard, ils s'approchèrent du bureau, Flora prit l'enveloppe de ses mains et passa sa manche pour dégager la poussière s'étant reposée dessus. Leurs noms y étaient inscrits, comme des destinataires. Reprenant profondément sa respiration, elle ouvrit la lettre, tremblante.

La lettre était, comme ils le pensaient, de Jin. Flora reconnaissait aisément l'écriture dont elle était écrite, c'était la même qui était présente dans les marges des livres qu'elle avait étudié, donnant des précisions ou rectifiant certaines choses.

« Flora, Raito, peut importe le moment où vous trouverez cette lettre, il est temps que vous appreniez plusieurs choses sur nos anciennes activités, à moi et aux pères dont les enfants enlevés cette nuit là. Bien avant avoir rencontrés vos douces et tendres mères, nous travaillions en tant que mercenaires pour un prince vabbien dérogeant beaucoup sur la loi. Nous accomplissions des travaux, sans réelle gravité, comme de la garde rapprochée, ou de l'espionnage.

Jusqu'au jour où il nous ordonna d'enlever des enfants, d'assassiner des personnes dérangeant son commerce peu scrupuleux ou encore d'intimider des politiciens trop curieux. La récompense était, bien sûr, conséquente, mais aucun de nous n'était capable de réaliser de telles choses. On eut alors décidé de déserter ses services, sans préavis.

Après plusieurs semaines, nous avons fini par nous installer ici même, près du centre canthien où, au fil du temps, nous avons construit chacun notre propre famille. Peu à peu, en vous voyant grandir, nous étions en train d'oublier ce passé peu valorisant, jusqu'au jour où, malgré nos nombreuses couvertures dans le pays, notre ancien employeur, comme vous le savez, fit enlever quatre de nos enfants.

Vous êtes maintenant adultes et j'ose espérer que vous mesurez parfaitement le danger vous attendant si vous comptez vous en prendre à cette personne. Un groupe de mercenaires basé dans les quartiers modestes du Bazar de Kodash pourra vous aider, ils sont bien informés sur ce prince, malgré que le défaire n'est pas dans leurs priorités.

Je suis maintenant trop vieux pour me battre et j'ai encore beaucoup de comptes à rendre, je vais m'installer au Monastère Shing Jea, où un poste m'a été proposé dans l'enseignement. Quant à toi, Flora, ta mère est partie aux côtés de ta petite soeur. Plus rien ne la retenait ici, hormis sa solitude. Pour finir, je ne peux que vous souhaiter bonne chance, prenez bien soin de vous.. »

Une adresse était griffonnée dans le coin du parchemin, renseignant les deux jeunes aventuriers sur leur prochaine destination.

Raito, se tenant derrière elle, ayant lu la lettre par-dessus l'épaule de Flora, la sentait particulièrement tendue. Elle réalisait enfin qu'elle avait une chance de sentir de nouveau sa petite soeur dans ses bras. Voulant briser le silence s'étant installé depuis quelques minutes déjà, Raito lui chuchota d'une voix douce : « Nous partirons dès que tu le voudras, nous avons tout notre temps.. ». Flora remit lentement la lettre dans son enveloppe, puis tourna lentement la tête, regardant Raito dans les yeux. Il ne mit pas un instant pour comprendre son regard, il était rempli de détermination.

Flora se réveillait, la tête plongée dans son oreiller et gardant ses yeux clos, elle songeait sans cesse à leur avenir proche, sur leur réussite ou leur échec. Parcourant le lit à tâtons, elle cherchait Raito, ne trouvant que des draps défaits, elle s’arrêta, il était déjà parti, comme tous les matins. Elle finit par se lever, ses longs cheveux blonds glissant sur ses épaules, s'habilla légèrement et rejoignit le pont se frottant les yeux.

A sa sortie, une douce brise la caressant, faisant onduler ses cheveux ayant pris une teinte dorée grâce à l’éclatante lumière du soleil levant. Raito était quelques mètres devant elle, accoudé à la rambarde du bateau, face au continent. Elle s'approcha à petit pas, puis, arrivée à ses cotés, elle lui agrippa le bras, sans un mot et reposa sa tête sur son épaule.

Les plaines et les rizières Istanis défilant lentement sous leurs yeux, elle se remémorait tout les instants passés en sa compagnie, ces moments de joie, de bonheur et d’amour non avoué. Ils restèrent ainsi pendant plusieurs heures. La forteresse de Jahai passée, ils admiraient maintenant les Canyons de Yatendi, les falaises dorées se reflétant tel un miroir dans l’eau paisible du fleuve.

Ils discutaient maintenant de la faune présente, s'amusant à les décrire, voyant des skrees livrer un féroce combat avec une horde de béhémoths tandis que des scarabées faisait pleuvoir des pierres sur des soldats kournans pendant leur ronde matinale. Raito, déclara d'une voix enjouée : « Ils n'ont pas l'air de s'ennuyer ici au moins ! » Après quelques secondes d'appréhension, elle lui murmura : « Raito.. Quand tout ceci sera fini, que dirais-tu de vivre ensemble..? Sérieusement.. »

Sans attendre, il se pencha lentement sur elle, l'embrassant délicatement sur le coin de la bouche puis répondit : « Il va falloir se dépêcher alors.. » dit-il avec un sourire complice, se retournant ensuite vers les roches leur faisant face.

Les cascades passées, ils se trouvaient désormais dans la vallée de Vehtendi, discutant toujours sur ce qui passait devant eux, les cultures en terrasses, les marchés ou encore sur les divers animaux présents au bord de l'eau. La nuit tombant, le bateau accostait au port de Kodash, malgré l'heure, les marchands étaient toujours nombreux, débattant sur les prix des divers matériaux. Flora, enjouée par l'animation et la beauté du lieu, sauta sur le quai à la première occasion, entrainant Raito avec elle, plus heureuse que jamais.

Le soleil se couchant, les coupoles dorées de la cité brillaient comme jamais. Flora et Raito découvraient petit à petit la ville de Kodash, émerveillés par tant de beauté. Les plantes étaient omniprésentes, emmêlées aux rambardes des escaliers, suspendues aux porches encerclant les fontaines, ou encore aux pieds des maisons, comme les nombreux palmiers dont la cime était aussi haute que les habitations leur faisant face.

Ils parcouraient les rues pavées de la cité avec gaieté et enthousiasme, Raito se laissant aller en contemplant l'ardent plaisir de Flora. Elle, sillonnait la place d'étale en étale, impressionnant les marchands de sa joie de vive débordante pour une voyageuse hors du commun. Arrêtée à une boutique de bijoux, elle s'offrit deux bracelets de pierres précieuses, quand Raito vient lui souffler à l'oreille :

« Ils te vont à ravir.. Et puis, leurs bagues sont merveilleuses, je sais désormais où me rendre si.. Enfin, ne traînons pas, la nuit est proche. »

Flora acquiesça d'un signe de tête, trop dérangée par ses sous-entendus, n'osant pas déclarer un seul mot sous peine de révéler son mal être pourtant heureux. Ils sortirent de la boutique, Raito tirant gentiment Flora par la main.

Flora explorait maintenant la ville en compagnie de Raito, cherchant l'adresse donnée dans la lettre de son maître. Le couple s'étant aidé à plusieurs reprises des riverains encore présents dans la rue, arriva avec peine à l'adresse indiquée.

Raito, après avoir jeté un bref sourire à Flora, frappa la porte à plusieurs reprises. Une voix féminine les autorisant à entrer se fît entendre. Raito poussa donc la porte d'un geste tranquille, les gonds de la porte ne grinçant qu'un petit instant.

Le couple découvrit deux femmes, toutes les deux penchées sur une carte déroulée sur la table disposée au centre de la pièce. La plus grande avait une carrure de guerrière, elle était vêtue d'une armure de gladiatrice et ses traits du visage laissait présager des origines canthiennes.

La seconde était légèrement moins grande, son armure dorée et agrémentée de reflets d'obsidiennes affichaient malgré elle une richesse matérielle conséquente. Ses broches et son teint bronzé laissaient quant à eux songer à une ascendance locale.

Après quelques secondes de silence, les deux femmes se redressèrent. Avant que le couple de visiteurs n'ai pu dire un mot, la femme à l'apparence d'une guerrière déclara sans retenue :

« Hé bien, toujours aussi belle ma petite Flora.» termina sa phrase avec un sourire charmeur se formant à ses lèvres.

Flora, après un court moment de réflexion, se rappela. Ren Fujiwara, une forte tête qui vivait près de chez elle, malgré son âge un peu plus avancé, elle était toujours prête à l'aider pour quoi-que ce soit. Son visage n'avait pas tellement changé, comparé à son corps devenu athlétique ayant malgré tout gardé des courbes féminines.

Sans attendre un instant, Flora alla se jeter dans les bras de la combattante, cette dernière se mettant à vaciller à la réception de la petite moniale.

« Toujours aussi belle, mais pas aussi légère.. » déclara Ren d'une voix amusée. Flora, se détachant de Ren, revint vers Raito en lui prenant le bras, étant quant à lui un peu déconcerté par la situation.

« C'est une amie d'enfance.. » lui dit Flora d'une petite voix. Ren poursuivit :

-Et voici Lyraa, la co-dirigeante de cette organisation en compagnie de moi-même.

-Bonsoir et Bienvenue parmi nous. » Continua Lyraa d'une voix douce.

Les présentations faites, les quatre combattantes discutèrent chaleureusement pendant un moment, jusqu'au moment où Raito aborda le sujet des enfants enlevés. Suite à cela, Lyraa répondit sans attendre.

« Le prince dont vous parlez est bien malheureusement responsable d'une grande part du travail que nous effectuons dans la région. Le travail exigé pour trouver et libérer ces enfants sera long et délicat, ils sont le plus souvent exploités dans des mines de pierres précieuses relativement nombreuses dans les environs. Enfin, nous en rediscuterons demain, vous devenez être épuisés. Un de mes appartements est actuellement libre, vous pourrez y loger pendant votre séjour. » Dit-elle avec sa voix toujours aussi douce.

Reprenant son souffle avant de continuer en se tournant vers Ren.

« Ren, pourrais-tu les y mener..? Je vais finir le travail que nous avions commencé pour être libre à ton retour.. » Finit-elle avec sourire charmeur, la voix toujours aussi tendre et voluptueuse.

« Oui, bien sûr.. » Répondit Ren avec entrain, heureuse de revoir sa petite protégée.

Flora et Ren ayant fait leurs au revoir à Lyraa, le trio partit vers l'appartement en question. Malgré le court trajet effectué, Flora et Raito se rendirent compte de leur fatigue accumulée pendant la journée et ne s'était pas rendu compte de l'heure avancée. A leur arrivée, ils remercièrent chaudement Ren. Après une courte visite des lieux, les deux amants gagnèrent la chambre pour une longue nuit de sommeil.

Flora se réveillait, ses cheveux blonds étalés sur oreiller qu'elle enlaçait avec douceur. Après quelques instants de somnolence, elle fit glisser sa main à côté d'elle, cherchant avec espoir son amoureux, en vain. Percevant des voix de commerçant provenant de la rue, elle se redressa légèrement, retenant de sa main un léger drap pour couvrir sa poitrine.

Elle finit par se lever, nouant le drap autour d'elle. Elle rejoignit le balcon donnant sur la rue en ébouriffant ses longs cheveux. Elle vint s'accouder à la rambarde, posant sa tête sur la paume de sa main. Rêveuse, elle se laissait bercer par le flux de paroles provenant quelques mètres plus bas. Son repos fût soudainement coupé, elle sentit des mains se poser de part et d'autre de sa taille.
« Allez, ne tarde pas trop, elles nous attendent. » lui souffla Raito au coin de l'oreille. Sans perdre un instant, il détacha ses mains de sa taille, Flora quant à elle, attrapa sa tenue bleu-ciel et fila vers la salle de bain. Elle sortit un moment après, ayant, comme à son habitude coiffée ses cheveux en forme d'anses circulaires. Raito sourit, puis la pris par la main et l'entraîna à l'extérieur.
Ils discutaient déjà depuis une demie heure, le jeune couple parlant de leur voyage et des paysages rencontrés. Après un court instant de silence, Raito déclara :
« Enfin.. Vous savez pourquoi nous sommes venus ici ? Qu'avez-vous à proposer pour récupérer nos frères et sœurs ? » Demanda Raito d'une voix calme.

-« Ce n'est pas la première que nous avons à satisfaire ce genre de demande.. Pour les fois précédentes, nous n'avions que pour seul choix de mener une enquête, visant à déterminer leur position et par la suite d'attendre que le prince déplace ces enfants là vers une autre mine par exemple.. » Répondit Lyraa d'une voix lente.

-Attendre.. Dit-il d'un air faussement songeur. C'est tout ce que vous avez à proposer ? Pourquoi ne pas aller directement lui rendre visite ? Mes dagues à la gorge, il nous les livrerais sans attendre.. Rétorqua Raito, le ton insistant.

« -Faut-il encore pouvoir l'atteindre.. sa gorge.. » Répliqua Lyraa sans attendre, sa voix montrant son léger amusement.

« -Vous sous-entendez que je suis incapable d'y arriver..?

-Oh, non.. Je ne me permettrais pas, juste un peu.. suicidaire..

-Vous ne manquez pas d'air pour parler ainsi des compétences d'une personne que vous ne connaissez pas...

-J'en sais assez pour savoir que vous seul ne pourrez rien, même si vos compétences dépassent l'entendement.

-Assez, vous deux. » Interrompit Ren, lassée par le débat sans fin qui s'engageait. Elle se tourna vers Raito, calme et sereine.

« -Monsieur, nous vivons ici, connaissons cet homme mais surtout son influence. Alors s'il vous plaît, faites-nous confiance.

-Bien.. Comme vous voudrez, mais ne jouez pas avec ma patience ou je risque de réellement passer à l'acte. » Flora poursuivit d'un air timide.

« -Que pouvons-nous donc faire en attendant..?

-Nous aider par exemple. Après tout, si vous arrivez un jour à vos fins, vous nous devrez bien cela. Autant commencer à payer votre dette dès maintenant. Qu'en dites-vous ?

-C'est d'accord, nous sommes à votre service. Nous n'avons nul autre endroit où aller de toute manière. »

Cela faisait maintenant bientôt quatre mois que le jeune couple était lié aux affaires de cette petite organisation. Un soir, Lyraa les demanda, après de multiples convocations sans réel intérêt, ils avaient commencé petit à petit, à perdre espoir. Mais Lyraa, leur appris la nouvelle de sa voix calme habituelle.
Quatre enfants ayant entre dix et quinze ans, enlevés dans la région de Kaineng quelques années plus tôt allaient être déportés avec d'autres prisonniers vers une mine de saphir de la région. Flora et Raito se réjouissaient de la nouvelle, celle-ci étant la plus encourageante des dernières semaines.

Le lendemain matin, les préparatifs étaient lancés. La mission d'interception du convoi était au centre des discussions. D'après les sources de la jeune commandante, le convoi était censé regrouper une dizaine de prisonniers et près du double de gardes. À cette nouvelle, Flora sentit un frisson parcourir son dos, elle doutait, de ses compétences, de son entraînement, de tout..

Le grand jour approchait et elle n'était plus sûre de rien. Raito, perçu cela et la rassura, énumérant les unes après les autres les impasses dont elle les avaient sortis. Flora reprit son habituel sourire avant de déclarer dune voix sereine et pleine d'espoir : « Libérons les et rentrons chez nous. »
Les mercenaires mobilisés était des archers et des élémentalistes, un groupe parfait pour l'embuscade préparée par Lyraa. Celle-ci devait être accompagnée par Flora et Keyraa dans les arrières. Ren et Raito, les deux combattants du groupe d'intervention était camouflés à la perfection, s'abritant derrière de larges rochers.

Le chariot bâché arrivait lentement, son avancée retenue par le sol mouvant. La vingtaine de gardes prévus était au rendez-vous, les archers alliés se concertait pour prendre leurs cibles respectives. Ces derniers maintenant en position dans les recoins de la falaise choisie au préalable, le convoi était désormais à portée de tir.

La tension était à son comble, Flora était toujours aussi incertaine sur ses compétences, malgré les paroles rassurantes de son équipière. Un cri à glacer le sang la relança, le combat avait débuté.

Maintenant placée au bord d'un imposant rocher, elle se démenait pour protéger l'ensemble du groupe, usant de tous ses talents. Le spectacle était à la fois impressionnant et fulgurant de violence. Tandis que Raito et Ren se battait avec force et acharnement, les météores s'abattait sur les protecteurs ennemis, ces derniers dénués de tout abri. Flora s'essouffla rapidement, usant de ses enchantements sans modération, la vie de ses alliés lui étant trop chère. Mais cela n'avait plus de réelle importance. Tous les combattants ennemis étaient abattus. Ren et Raito achevaient maintenant les quelques guerriers pris d'agonie.

L'équipe se dirigea maintenant vers le chariot dépourvu de protection. Sans attendre un instant de plus, Lyraa leva le voile. Une petite quinzaine d'enfants était là. Apeurés, ils se tassaient dans le fond du chariot. À vue d'œil, ils étaient tous âgés de dix à quinze ans.

Flora scrutait un à un les visages des enfants libérés avec l'espoir d'y croiser le regard de sa tendre sœur. Quand ce moment arriva, son cœur déjà palpitant fit un bond. Elle murmura son prénom, des alors, la petite se rua sur elle. Tandis que sa petite sœur la serrait avec intensité, Flora n'osait y croire, elle l'avait fait, sa petite sœur était désormais libérée de cette vie sans avenir. Raito quand à lui retrouvait son petit frère, ce petit restait sans voix devant l'homme qu'était devenu son aîné. L'heure était donc maintenant à la joie/, les chaudes larmes des frères et sœurs réunis attendrissait tous les membres de l'équipe, sans exception.

Quelques semaines après, l'ensemble des enfants ayant rejoint leurs parents, une très longue discussion avait eu lieu. Les douloureux récits de ses deniers étaient difficilement imaginables. Leur tendre enfance leur avait été volée pour leur faire subir esclavage et travaux forcés. Flora restait cependant positive, les enfants étaient saufs et libres. Raito quant à lui voyait désormais les choses d'un autre œil.
Le couple était sur le point de se coucher quand Raito engagea la discussion.

« -Flora, tu les as vu, tu les as entendus, tout comme moi.. Je dois les venger, j'irais tuer ce monstre, où qu'il soit..

-Mais enfin.. Tu ne te rappelles pas de ce que t'avais dis Lyraa..? Nous n'avons aucune chance d'y arriver, quels que soit nos moyens..

-Peut importe.. » A cette réponse, Flora lui happa le bras avant de lui répondre, son regard tremblant d'inquiétude fixé au sien.

« -Raito.. mon cœur.. Tu ne vas pas tout gâcher maintenant ? Nous avons tout pour être heureux. Vivons ensemble, marions-nous.. Ne laisse pas cet homme monstrueux entacher davantage nos vies.. »

Sur cette dernière phrase, Flora se serra contre lui. Lui offrant à cette occasion leur premier baiser, timide, mais gorgé de tendresse.

« -Très bien Flora.. Comme tu voudras.. » Répondit Raito, encore surpris par sa démarche des plus courageuses compte-tenu de son caractère. Ce dernier se coucha, donnant à Flora une image de lui vierge de tout désir de vengeance. La petite moniale restait tout de même anxieuse, elle resta donc veiller auprès de son tendre compagnon.

Au petit matin, elle se réveilla difficilement. Elle se rendit rapidement compte qu'elle avait failli à son souhait. Raito s'était levé plus tôt comme à son habitude, mais le souvenir de la discussion qu'elle avait entretenu avec lui la veille refit surface. Ne voulant pas rester un instant de plus figée dans son lit, elle enfila à toute vitesse sa tenue Kurzick avant de rejoindre le quartier général de l'organisation, sans prendre peine à coiffer ses longs cheveux blonds.

Quand elle arriva à destination, il n'y avait aucune trace de Raito et personne n'avait souvenir de l'avoir vu cette matinée là. Elle courut vers le bureau de Lyraa, expliquant sans attendre à cette dernière la situation. Après l'avoir attentivement écoutée, Lyraa se redressa pour lui répondre de sa voix habituelle.
« Je suis désolée.. Il était prévenu, s'il a pénétré dans l'enceinte du palais, nous ne pouvons plus rien pour lui. Mais en tant qu'amie, je te déconseille d'aller à sa recherche. Ça ne ferait que mettre une vie en plus en péril. » Lyraa finissant sa phrase avec une expression de douce tristesse au visage.
Interloquée, ne pouvant pas croire ce qu'elle ressentait, elle s'apprêtait à aller interroger les autres mercenaires, coupée par Lyraa lui disant qu'ils ne voudraient pas jouer leurs vies pour un suicidaire..

Sans réelle hésitation, ni préoccupation de la mort qui pouvait l'attendre, elle retourna à l'appartement. Elle attrapa un sac en y mettant toutes les choses utiles qu'elle trouva, cartes, nourriture, bandages et divers sceaux.

Quelques heures plus tard, elle arriva aux abords du palais, après un brève recherche de son compagnon, (..) Elle se dirigea vers une entrée secondaire, reclue entre deux falaises. S'approchant le pas silencieux, Flora ne mit pas bien longtemps pour s'apercevoir de l'atrocité de la scène s'imposant devant ses yeux. Le sang encore frais des deux sentinelles coulait sur le marbre des marches avec abondance. À en voir les corps lacérés des deux gardes, c'était un travail exécuté par un assassin. Flora, malgré les nombreuses missions effectuées à ses côtés, était presque choquée par l'atrocité que la scène dégageait.

Elle ne pouvait pas reculer, elle parcourait désormais le dédale de couloirs telle une ombre. Par moment, son chemin débouchait dur de grandes salles contenant de grands piliers. Dans ces dernières, de longues toiles étaient suspendues en hauteur, des symboles vabbiens ordonnés par colonnes y était cousu avec du fil d'or. Malgré l'anxiété dont Flora faisait l'objet, elle oubliait presque la raison de sa venue, charmée par la richesse décorative s'offrant à elle. Au fil de ses recherches, elle se perdait dans le dédale de couloirs aussi sublimes les uns que les autres.

Un tintement de dague résonna, suivi par de nombreux cris. S'agrippant à la toile de soie à ses côtés, elle devait maintenant faire face à la réalité.